Manipulation passive et Psychologie Inversée – Leçon 12
La semaine dernière, j’ai commencé à vous parler de techniques que l’on peut détourner de son utilisation d’origine, il s’agissait de la PNL ( « PNL et synchronisation « ), et cela a soulevé pas mal de débat.
Je tiens donc à préciser que jamais je n’ai jamais dit que la PNL était une technique dédiée à la manipulation !
J’ai seulement dit que la PNL peut être détournée à des fins de manipulation.
Dans cet article, je vous propose de saisir à quel point la frontière entre manipulation « innocente » ou influence et manipulation égocentrique voir perverse est fine et pas si facile à sentir (voir l’article : « la manipulation : savoir en jouer pour s’en protéger »).
Je vous rappelle donc les définitions :
Une manipulation est dite « innocente »
lorsque le résultat de la manipulation ne se fait pas au dépend de la personne manipulée.Une manipulation est dite « égocentrique »
dés lors que le but est la satisfaction personnelle du manipulateur.Une manipulation est dite « malveillante »
à partir du moment où elle vise la destruction de la personne manipulée pour la satisfaction personnelle du manipulateur.
Et d’une manière générale, dès qu’une manipulation lèse la personne manipulée, il faut la considérer comme malsaine.
Ces notions rappelées, je vous invite à (re)découvrir comment tous les jours, nous flirtons allègrement avec la manipulation, et comment nous sommes toutes et tous manipulés…. l’essentiel étant que cela reste dans le domaine de l’influence et de l’innocence.
Bonne lecture.
La manipulation passive : Quand agir est contre-productif.
En général, on ne prend pas de décision sans y trouver un quelconque intérêt. Or, quand on conseille aux gens de faire quelque chose « pour leur bien », l’intérêt immédiat n’est souvent pas vraiment évident pour eux, c’est d’ailleurs pour cela qu’ils ont autant de mal à nous écouter et nous obéir :
« tu devrais ranger ton vélo », « vous devriez faire plus attention avec les factures », « tu encore laissé traînait tes papiers sur la table »…
Il l’est d’autant moins si quelqu’un fait la chose à votre place : « bon, je l’ai rangé dans le garage, mais c’est la dernière fois », « je les ai mis dans la pochette bleue » etc.
Dans ces moments-là, l’autre ne peut pas se remettre en question, il ne prend pas réellement la mesure de ce qu’on lui dit.
S’il y a toujours quelqu’un pour assurer mes arrières, à quoi bon faire les choses moi-même ?
Si jusque-là, mon comportement n’a porté préjudice à personne, alors pourquoi en changer ?
La manipulation par la passivité est à réserver aux personnes sur lesquelles, vous le savez, vos conseils n’auront pas d’impact ou un impact contre-productif.
Il faut également être certain que ce que vous voulez pour cette personne va dans une direction logique, que, si vous vous abstenez d’intervenir, elle va forcément modifier son comportement dans le sens que vous souhaitez.
Il faut que la personne trouve un intérêt elle aussi dans la décision et qu’elle soit sûre de l’avoir prise seule en toute liberté.
« Je sais ce que je fais ».
C’est un fait, personne n’aime se faire dicter sa conduite. C’est infantilisant, vexant, énervant…
En général, quand quelqu’un nous impose de faire certaines choses, on va agir en réaction, c’est-à-dire que l’on va y mettre de la mauvaise volonté, mal travailler, afficher notre mécontentement, ou encore même faire exactement le contraire.
L’ambiance ne sera donc pas au beau fixe !
Comment quelqu’un d’autre que moi peut-il savoir ce qui est bon pour moi ?
De quel droit peut-on s’arroger le droit de juger la conduite des autres ?
Ce sentiment naturel de défiance à l’égard de l’autorité, est ressenti très tôt dès l’adolescence.
Par la suite, même si la relation d’autorité qui nous lie à nos parents a disparu, ce sentiment reste vif à l’égard de tout ce qui peut s’apparenter à une façon de régenter notre vie, ou à une forme de lien d’autorité.
Comme avec votre conjoint ou notre supérieur hiérarchique.
Les campagnes de prévention sont un bon exemple :
les seules personnes vraiment touchées sont celles auxquelles le message ne s’adresse pas directement.
A-t-on jamais vu quelqu’un s’arrêter de fumer parce qu’il avait été bouleversé par un message de prévention ?
Au contraire, ces campagnes sont souvent prises à la légère, moqué, comme pour mieux affirmer le libre arbitre de celui qui n’en tient pas compte.
On l’a vu il y a encore pas longtemps avec cette mode de collectionner les paquets de cigarettes trash chez les ados : ce n’est pas de collections qu’il s’agissait réellement mais plutôt d’un défi à l’égard de celui ou de celle qui menace leur liberté de décider.
Laisser faire les conséquences logiques.
Parfois, la meilleure chose à faire pour amener quelqu’un à faire ce que l’on attend de lui est… de ne rien faire (ce qui souvent demande bien plus d’énergie et de volonté) et de laisser faire les conséquences logiques : peut-être que le vélo qu’on voulait ranger sera-t-il volé, la secrétaire étourdie réprimandée, les papiers importants perdus… ?
Certes, il semble assez cruel de laisser quelqu’un prendre des risques sans lui donner aucun conseil, mais à considérer l’effet réel de ce conseil (c’est à dire indifférence au mieux redoublement de la conduite incriminée au pire), n’est-ce pas surtout une façon de se donner bonne conscience ?
N’oubliez pas que pour faire prendre une décision à quelqu’un, il vaut mieux qu’il se sente pleinement libre de la prendre et le laisser agir face aux conséquences de ses actes est sans doute la solution la plus simple face à une personne de bon sens. Laissez la.
Si vous avez décidé d’œuvrer dans ce sens, il est important de garder le cap même quand vous pensez avoir gagné la bataille.
Si vous voulez voir se pérenniser le nouveau comportement, évitez les « je te l’avais bien dit », « tu vois, quand tu veux ? » Et autres « ce n’est pas faute de te l’avoir répété », sous peine de voir tous vos efforts de passivité réduits à néant.
Bien sûr, vous avez le droit d’être content et de la féliciter pour son changement de comportement mais ne fanfaronnez pas, gardez votre satisfaction pour vous, vous donneriez l’impression d’avoir tout manigancé !
La psychologie inversée : l’illusion de la liberté
Si vous voulez qu’une technique de manipulation fonctionne, il faut que la personne que vous souhaitez manipuler soit persuadée qu’elle agit de son propre chef, toute seule, et que vous n’y êtes pour rien.
Qu’elle est complètement libre de ses agissements.
Il ne faut pas lui donner l’impression de l’influencer ou de l’amener vers quelque chose.
Elle doit vraiment croire qu’elle prend ses propres décisions.
Dans les situations d’autorité, ce sentiment de liberté est naturellement menacé : les parents, les professeurs sont vus comme trop autoritaires par les adolescents, parce qu’ils décident à leur place, ils leur imposent certaines tâches à effectuer.
Les managers sont perçus comme paternalistes par leurs employés, et même les amis se mêlent parfois de ce qui ne les regardent pas en donnant trop de conseil ou en faisant la morale.
La réaction naturelle devant ce risque de se voir amputer d’une partie de sa liberté, devant ce péril, qui peut être plus ou moins exacerbée selon le caractère, l’âge des individus et le rapport qu’ils entretiennent avec les autres, est la résistance passive ou le contre-pied, c’est ce qu’on appelle le concept de réactance.
Tout d’abord, la résistance passive consiste à s’opposer à l’autorité sans l’affronter directement, sans entrer dans le conflit.
Concrètement : si mes parents insistent pour que j’arrête de fumer, je vais me mettre à fumer plus. Non pas parce que j’éprouve un soudain besoin de fumer, mais parce que ma liberté de fumer s’est vue menacée.
Utiliser la réactance.
On peut mettre à profit ce concept de réactance pour manipuler une personne.
De manière caricaturale, il s’agit de demander le contraire de ce que l’on veut de façon à ce que la personne agisse comme on le souhaite par réaction.
Il faut bien sûr connaître la personne avant pour savoir qu’elle réagira de cette manière quand elle croit que sa liberté d’action est menacée.
Plus vous persisterez dans votre engagement, plus votre sujet persistera dans le sien.
Voilà pour la théorie.
En pratique, il faut évidemment savoir être subtil : il est peu probable que vous obteniez ce que vous désirez si vous interdisez à vos enfants de se laver les dents ou que vous conseillez à vos collaborateurs de prendre des pauses déjeuner plus longues. Il faut employer des moyens détournés.
Toute la manipulation repose sur la sauvegarde de la liberté :
la personne va réagir non pas en fonction de l’action en elle-même mais pour avoir le sentiment qu’elle n’est pas sous contrôle.
Si elle se rend compte du subterfuge, elle risque de redoubler d’hostilité à votre égard et ne plus jamais vous accorder sa confiance.
Soyez prudent.
Une technique à réserver qu’à des manipulations innocentes, donc.
Enfin, il faut garder à l’esprit que cette technique repose sur un dysfonctionnement dans la relation interpersonnelle : la personne que vous cherchez influencer se sent menacée par vos agissements.
À moins de vouloir conserver ce déséquilibre, il est peu souhaitable de laisser ce sentiment perdurer.
Par contre, dans le cas d’une manipulation perverse, le manipulateur va tout faire pour entretenir ce déséquilibre et c’est d’ailleurs ce qui rend si fragile les personnes « victimes » de MPN.
En effet, ces dernières convaincues d’avoir agi selon leur libre arbitre, vont se culpabiliser jusqu’à s’autodétruire psychologiquement.
Applications pratiques.
Voici maintenant quelques exemples de situations concrètes pour mettre en pratique cette technique d’influence.
À votre meilleur ami qui est célibataire depuis des années et qui vous reproche de vouloir vous immiscer dans sa vie privée en voulant lui faire rencontrer des partenaires, cessez de lui organiser des rencontres, vous pouvez lui présenter des femmes à l’occasion, innocemment, en lui précisant bien qu’elles ne sont pas son genre.
Ou organiser une fête dans laquelle vous inviterez beaucoup de monde, dont plusieurs femmes célibataires, sans le prévenir.
Votre enfant est « difficile », il ne mange jamais rien et refuse de goûter tous les nouveaux aliments que vous lui proposez ?
Essayez la technique suivante : servez-vous généreusement de ce nouveau mets sans lui en donner et montrez que vous vous régalez. Ne lui en proposez surtout pas et précisez que ce n’est pas un aliment pour les enfants, que c’est uniquement réservé aux adultes.
Le fait qu’il n’est pas le droit d’en manger lui donnera tous les coups très envie d’y goûter !
Vous aimeriez ne pas avoir à supplier à chaque fois votre collaborateur de vous accompagner pour les réunions trimestrielles avec le reste de l’équipe : organisez la en l’ignorant ouvertement. Ne l’invitez pas. Montrez-lui que vous pouvez vous débrouiller tout seul.
Inversement, si vous ne voulez plus voir les petites amies de votre fils à la maison, entourez les d’une affection hors de propos, vous pouvez même les inviter à dîner sans prévenir votre fils.
En résumé :
Changer les autres.
Faire changer quelqu’un pour son bien est une opération plutôt délicate parce que s’il n’y voit pas d’intérêt immédiat, il ne coopérera pas. Et à force de vouloir le protéger, on est amené à faire les choses à sa place, ce qui ne l’incite pas au changement.
Vouloir bien faire et donner des conseils bienveillants sont souvent contre-productifs.
Conseiller – diriger
La personne doit donc voir d’abord où est son intérêt à modifier son comportement et aussi être persuadée d’être libre d’agir comme elle le souhaite.
Conseiller peut être ressenti comme une façon de diriger et vous n’obtiendrez rien comme ça à long terme, à part une certaine mauvaise volonté voir un résultat bâclé.
Personne n’aime que les autres décident à leur place.
Laisser jouer les conséquences logiques.
Ne faites plus rien.
Laissez-les faire face à leurs responsabilités.
Cela peut se révéler une solution bien plus efficace que tous les conseils ou les manipulations « actives ».
Les personnes seront alors pleinement libres de réagir. Elles se rendront compte par elle-même de la nécessité de faire un effort de comportement et elles le feront en toute liberté.
Le besoin de liberté.
Quand il y a un une relation d’autorité ou une trop grande emprise, le sentiment de liberté de la personne est menacé. Elle sent sa liberté d’action en péril. Aussi pour récupérer ce sentiment, elle va faire l’exact contraire de ce que vous attendez.
Pour la manipuler, il va donc falloir lui laisser entendre qu’elle est totalement libre dans les décisions qu’elle prend.
La résistance passive.
Cette décision de résister provoque un phénomène d’engagement.
Il sera proportionnel à l’emprise que ressent la personne.
Plus vous insisterez, plus sa volonté d’aller à l’encontre de vos désirs sera forte.
C’est le concept de réactance.
Pour le contrer, demandez l’inverse de ce que vous désirez pour qu’elle vous donne ce que vous vouliez au départ, par réaction.
Cette attention aux conséquences.
Il s’agit d’une lutte pour la liberté. Si la personne découvre qu’elle s’est faite avoir, sa réaction risque d’être forte et votre relation risque d’être mise en danger.
N’oubliez pas que si vous avez recours à cette technique, c’est qu’il y a un déséquilibre dans la relation : la personne a l’impression que vous êtes une menace pour sa liberté.
Par contre, si ce déséquilibre est entretenu, c’est que la personne qui l’entretient est une vraie menace pour votre liberté.
Ce levier est très fréquemment utilisé par MPN.
Voilà, pour le moment, ce que je souhaitais vous dire concernant les techniques border-line de manipulation.
Dans le prochain article, nous verrons le langage du corps ainsi que le toucher et la proxémie.
En attendant, je vous souhaite un doux week end 🙂
Coeur-dialement
Valérie Madej
« Qu’il croit toujours être le maître, mais que ce soit vous qui le soyez, car il n’est de soumission plus parfaite , que celle qui ne prend l’apparence de la liberté » Voltaire, dans Candide
Bien joli commentaire qui est tout à fait approprié 🙂 merci Barbara
Merci, très intéressant je sens que votre blog aussi pourras mettre utilise dans mon apprentissage à la psycho, bien que je veuille faire des études de psycho et criminologie, avec une très bonne connaissance du langage non verbal, communication non verbal soit la gestuelle que je trouve passionnante, merci Valérie j’aurais peut-être une ou deux questions si possible, bien à vous 🙂
Bonjour Medhi
Vous allez faire des études bien passionnantes. Si je peux répondre à vos questions, je le ferai avec plaisir. Merci pour ce partage et pour votre intérêt. A bientôt.
Valérie
Bonjour, oui je me demandais niveau spécialité en décryptage non verbal, ou puis-je apprendre correctement? Etre aussi bon que Joseph messinger ou encore Paul ekman ahah, si vous avez des livres à me conseillé la-dessus c’est avec plaisir! Merci 🙂
Attention Meddhi aux séries télévisées qui ont une tendance à « amplifier » les choses. Pour arriver à décrypter le langage non-verbal, je pense que vous devriez commencer par vous former à la PNL (Programmation Neuro Linguistique) qui permet de pas mal décrypter la personnalité et les intentions d’une personne. Vous avez des personnes comme Paul Pyronnet, en France qui font d’excellentes formations. En terme de livres, vous avez des livres en format Kindle tels que « Apprenez la PNL – devenez un meilleur communiquant en 10 jours » d’Alexis Delune (http://www.amazon.fr/Apprenez-PNL-Devenir-meilleur-communicant-ebook/dp/B00AZOK7EU/ref=pd_sim_b_3?ie=UTF8&refRID=14DV1XXXTRGFQR65DHEQ)
ou alors dans la série « pour les nuls » vous avez « la programmation neuro linguistique pour les nuls » qui me semble être un bon ouvrage de référence pour débuter…. à vous de voir et de chercher celui qui vous « parle » le plus.
A bientôt
Super merci beaucoup, je vois bien c’est lequel dans la série pour les nuls je l’ai bien regardé mais ne me parlait pas trop, j’ai réussi à avoir quelques cours aussi sur la PNL et je trouve cela fascinant, merci encore pour vos réponses, et non les séries peuvent me plaire à regarder mais pas pour me basé sur mes recherches, cela n’est que quelques théorie général tourné complètement à la fiction .. A bientôt !
Avec plaisir ! Et faites confiance à votre intuition;… elle vous guidera toujours comme il faut, où il faut et quand il le faut 🙂 A bientot